La responsabilité d'un fournisseur de services de communication électronique envers son client est une responsabilité de plein droit. Il ne peut se dégager de sa responsabilité que s'il prouve que les problèmes résultent soit du client, soit du fait d'un tiers, imprévisible et insurmontable, soit d'un cas de force majeure, ainsi qu'il résulte de l'article 15, I de la loi dite "LCEN" (Loi 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique).
Par deux arrêts du 13 mars 2024, la première chambre civile de la Cour de cassation clarifie la portée de cette disposition et de son caractère d'ordre public. Dans les espèces qui lui étaient soumises, la Cour retient ainsi que l'opérateur de communications électroniques ne peut limiter sa responsabilité dans l'exécution de ses prestations.
Elle considère qu'une clause stipulant que l'opérateur n'est astreint qu'à une obligation de moyens est réputée non écrite, car contrevenant aux dispositions impératives de l'article 15 de la loi "LCEN". En clair, cet article astreint les opérateurs à une obligation de résultat, qu'ils ne peuvent restreindre par une clause diminuant l'intensité de leur obligation, incluant les clauses limitatives ou élusives de responsabilité.
Cass. civ. 1e, 13 mars 2024, n°22-12.345
Cass. civ. 1e, 13 mars 2024, n°23-13.498
La nouvelle directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises, appelée CSDDD, a été adoptée après plusieurs mois de négociations. Ce texte exige des entreprises de prévenir, stopper ou atténuer leur impact négatif sur les droits humains et l'environnement, notamment dans leurs chaînes d'approvisionnement, de production et de distribution. Cela inclut des problèmes tels que l'esclavage, le travail des enfants, la dégradation de la biodiversité, la pollution et la destruction de l'environnement naturel.
À qui cela s'applique-t-il ?
Les règles s'appliqueront aux grandes entreprises européennes (plus de 1 000 employés et un chiffre d'affaires mondial de plus de 450 millions d'euros) ainsi qu'aux franchises réalisant un chiffre d'affaires mondial de plus de 80 millions d'euros si une partie importante provient de redevances. Les entreprises non européennes seront également concernées si elles atteignent les mêmes seuils de chiffre d'affaires dans l'UE.
Que doivent faire les entreprises ?
Ces entreprises doivent intégrer le devoir de vigilance dans leurs politiques, investir dans des garanties contractuelles avec leurs partenaires, améliorer leurs plans de gestion ou soutenir les PME pour garantir leur conformité. Elles doivent aussi élaborer un plan de transition pour rendre leurs activités compatibles avec les objectifs climatiques fixés par l'Accord de Paris.
Quelles sont les sanctions en cas de non-respect ?
Les entreprises qui ne respectent pas ces obligations pourraient être confrontées à des amendes allant jusqu'à 5 % de leur chiffre d'affaires mondial. De plus, elles seront tenues responsables des dommages causés par leur non-respect des obligations de vigilance et devront indemniser intégralement les victimes.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Les nouvelles règles seront progressivement mises en place pour les grandes entreprises européennes et les entreprises non européennes atteignant les mêmes seuils de chiffre d'affaires dans l'UE : à partir de 2027 pour les plus grandes entreprises, et progressivement jusqu'en 2029 pour les autres entreprises concernées. Une fois adoptée définitivement par le Conseil de l'UE, ces règles entreront en vigueur progressivement.
PE, communiqué, 24 avr. 2024
Dans un arrêt du 27 septembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a considéré que le manquement à une obligation de conformité - ou "compliance" - pouvait permettre d'engager la responsabilité délictuelle de son auteur sur le fondement de la concurrence déloyale.
En l'espèce, la Cour juge que le fait, pour un concurrent, de s'affranchir d'une telle obligation - en l'occurence une obligation liée à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme - procure à son auteur un avantage concurrentiel indu.
En effet, le respect de ces obligations contraint les entreprises "vertueuses" à exposer des coûts supplémentaires.
Ce faisant, la chambre commerciale s'inscrit dans la tendance à l'accroissement du caractère contraignant des normes et bonnes pratiques de la compliance.
Cass. com., 27 sept. 2023, n°21-21.995
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